La respiration transparadoxale
Tiré du livre Sarbacana – Le Souffle du Présent de Michel-Laurent Dioptaz
Là aussi, notre corps va manifester des dynamiques antagonistes au même instant. Car, là aussi, notre attention sélective ne pouvant appréhender la respiration comme étant une et entière, va la séparer en deux, manifestant ainsi deux aspects de la respiration :
« le charnel » et « l’énergétique ».
Et de ce fait, nous n'allons pas vivre la même chose selon que nous nous posons sur le ressenti charnel de la respiration ou sur sa dimension énergétique.
Prenons la phase d'expiration par exemple… Alors que le corps, (le ventre, la cage thoracique…) se dégonfle et se rétracte, au même instant, au niveau de l'émission d'énergie, c'est exactement l'inverse qui se produit : accompagnant le souffle, l'énergie jaillit de nous, elle s’expanse.
Là où une attention posée sur « le charnel » vit une rétractation, l'attention éclairant « l’énergétique » ressent une expansion, et cela au même instant.
(Lors de l'inspiration, c'est le contraire qui se produit, alors que le corps s’expanse, l'énergie, elle, se rétracte.)
Et, si l'on utilise un mode de perception qui ne peut s'identifier qu’à une seule dynamique à la fois, il va nous falloir choisir entre éclairer d'attention la dynamique du corps physique, ou bien celle du corps énergétique. Les ressentis et les conséquences existentielles qui découlent de l'un ou de l'autre choix ne sont pas du tout les mêmes.1
Mais une fois de plus, c'est la forme de notre attention qui nous est montrée, pas la forme de notre souffle. Ces « deux » aspects du souffle n'existent que dans notre mental, pour qui, vivre une « expansion » et une « rétractation » au même instant et un insupportable et impraticable paradoxe. Pourtant lorsque les pensées s'arrêtent, transparaît une toute autre forme d'attention, une attention transparadoxale qui respire ces « deux » dynamiques au même instant, absolument en même temps.
Lorsque s'éclaire d'attention le souffle entier, c'est encore tout autre chose qui est vécu, quelque chose de totalement indescriptible dans le monde des mots, si ce n'est sous forme de paradoxes. Mais utiliser des paradoxes pour décrire un niveau de conscience où justement l’on n’en éprouve plus le moindre, me paraît bien peu descriptif.2
Ce que l'on peut dire, c'est que réaliser l'unité de son souffle réalise l’unité d'Être. Il n'y a plus alors de scission entre matière et énergie, corps et esprit.
(La respiration est un très bon endroit pour résoudre les paradoxes fondamentaux du mental. Car, si vivre un paradoxe crée des tensions, respirer profondément dissout les tensions.)
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1 On peut d’ailleurs constater que des écoles et des approches différentes se sont développées autour de chacune de ces dynamiques.
2 Nous nous trouvons ici, juste à l’articulation du phénomène Transparadoxal. (Voir en annexe note 1)
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